Antoine Séverin Île de la Réunion

Bonne lecture

1975, 14 février, Île de la Réunion

LDLN-No-147

Voici le procès-verbal de synthèse rédigé par brigade de la Gendarmerie Nationale de Petite-Ile, compagnie de Saint-Pierre, le 3 mars 1975. 

Exposé des faits.

Le 15 février 1975 à 10 heures, au bureau de notre brigade, se présente Mme S[-] Marie, sans profession, domiciliée à Petite-Ile dans la Réunion. Cette personne porte à notre connaissance que le 14 février 1975, vers 13 heures, son fils Antoine âgé de vingt et un ans a été fortement commotionné par un rayon lumineux provenant d’une boule brillante aperçue sur le piton du Calvaire à Petite-Ile. L’intéressé a regagné sa demeure à pied en empruntant le chemin du cratère qui passe près du cimetière. Notre informatrice précise que son fils lui a déclaré avoir vu trois petits bonshommes descendre de l’engin bizarre qui ne touchait pas le sol, les avoir observés puis avoir été projeté à terre par un puissant éclair parti de la partie supérieure de la soucoupe laquelle s’est ensuite élevée en sifflant très fort. Mme S[-] ajoute qu’après lui avoir fait le récit dont il a été témoin, son garçon, très bouleversé et choqué, a perdu l’usage de la parole et que de ce fait le docteur en médecine T[-] de Petite-Ile a été appelé au chevet du patient vers 19 heures. Sur notre demande, Mme S[-] affirme que son fils Antoine, parfaitement équilibré, n’a jamais été soigné pour maladie mentale. Elle ne croit pas à une hallucination. Nous prenons alors contact avec le docteur T[-] Ce praticien nous déclare verbalement que S[-] Antoine victime d’un choc émotionnel important est sous l’effet d’une crise pithiatique. Qu’il jouit de toutes ses facultés mentales, qu’il n’est pas atteint de blessures et ne porte pas de brûlures. L’intéressé est placé sous contrôle médical et un repos de quarante-huit heures lui est imposé. Sous la direction du maréchal des logis P[-], chef de poste, tout le personnel de la brigade participe à l’enquête administrative.

Mesures prises

Au reçu de ces informations, à 10 h 15 le 15 février 1975, nous rendons compte des faits au commandant de la compagnie de gendarmerie à Saint-Pierre. Suivant les instructions de cet officier, nous procédons au recueil de renseignements complémentaires permettant de concrétiser l’affaire et de localiser si possible le lieu de l’apparition de l’objet volant non identifié. Un message établi à 14 heures le 15 février 1975, est adressé à notre commandant de compagnie et ce message fait état de nos premières investigations et constatations.

Etat des lieux et constatations

Selon les dires de Mme S[-] Marie, l’endroit où l’objet a été observé se situe sur le piton Calvaire, territoire de la commune de Petite-Ile à la Réunion, à 300 mètres à l’ouest de l’agglomération. Ce piton, couvert sur ses versants de bois de filaos, comporte un plateau cultivé, traversé nord-sud par le chemin du cratère qui dessert quelques cases dissimulées dans la verdure. Compte tenu de l’imprécision du lieu et en raison du relief parfois rocailleux et broussailleux au sol, l’exploration du piton s’avère difficile. Nous ne découvrons aucune trace ou indice laissés éventuellement par le passage d’un objet volant non identifié.

Enquête

Le 15 février 1975 à 10 h 30, les gendarmes C[-] et C[-] se transportent au domicile de M. S[-] Maximin où se trouve son fils Antoine. Ils s’entretiennent quelques minutes avec l’observateur, celui-ci est alité. Ils constatent que l’intéressé est dans un état de prostration incontestable, ses yeux grands ouverts fixent l’inconnu. Sa mère présente, lui annonce la visite des enquêteurs, il tressaille. Aux questions qui lui sont posées, S[-] ne peut répondre de vive voix. Avec beaucoup d’acharnement par gestes, il décrit avec ses mains une forme ronde et allongée qui brille. Pour expliquer ce fait, il porte plusieurs fois ses mains horizontalement vers ses yeux. Il montre ensuite quatre doigts de sa main indiquant ainsi qu’il y avait quatre passagers vêtus de blanc et désigne pour cela le drap de son lit. Sa main se maintient à environ un mètre du plancher indiquant la taille des sujets. Des explications muettes, il apparaît que trois personnages équipés d’antennes étaient au sol groupés près d’une échelle à trois marches, le quatrième se trouvait dans la sphère ou coupole. De sa position allongée, S[-] Antoine fait une esquisse de l’engin qu’il a aperçu. Il termine sa démonstration en portant d’abord ses mains aux oreilles, puis au front et ensuite aux yeux. Sa face est grimaçante, il peut alors émettre un sifflement aigu, de très bas en crescendo tout en faisant tourbillonner l’index de sa main droite pointée vers le plafond, expliquant alors que l’engin s’élevait et disparaissait. Au préalable en décrivant les trois sujets, S[-] Antoine a élevé verticalement les deux index à 20 centimètres au-dessus de sa tête précisant qu’ils étaient équipés de courtes antennes et que celles du troisième ont bougé. A l’issue de l’entretien, S[-] Antoine, très agité, ne s’aperçoit plus de la présence des deux militaires dans la pièce.

Le 16 février 1975 à 9 heures, le lieutenant-colonel, commandant le groupement de gendarmerie de la Réunion, informé la veille des faits par notre commandant de compagnie nous ordonne d’effectuer une enquête, de rédiger un questionnaire OVNI et de procéder à diverses vérifications, notamment auprès des services de la tour de contrôle de l’aéroport de Gillot Saint-Denis, afin de connaître si des avions ou hélicoptères étaient en vol le 14 février 1975 entre 12 heures et 14 heures. Les instructions émanant de cette haute autorité sont exécutées dans le courant de la matinée du 16 février 1975. Aucun aéronef n’a survolé le département de la Réunion aux dates et heures indiquées. A noter que le 14 février 1975, à 13 heures, heure de l’apparition de l’OVNI, le temps était clair, le ciel dégagé, le soleil non voilé se trouvait pratiquement au zénith, il n’y avait pas de vent, aucune précipitation de pluie n’a eu lieu depuis le 10 février 1975. Le 16 février 1975 à 15 heures, S[-] Antoine est toujours dans un état second, il n’a pas retrouvé l’usage de la parole et de plus sa vue s’est considérablement affaiblie. Il peut faire quelques pas et toujours par gestes tente quelques explications concernant l’OVNI. Nous comprenons alors que cet engin ne touche pas le sol au moment de l’observation et s’est stabilisé à environ 1,50 mètre de la surface.

S[-] Antoine explique que s’approchant du lieu de l’apparition, il a été attiré par des sons « bip-bip » qu’il peut prononcer une douzaine de fois. Il a cherché à savoir d’où venaient ces bruits et a ainsi découvert la soucoupe au fond d’un champ, sur sa droite à une distance de 15 à 20 mètres. S[-] saute à pieds joints pour nous faire comprendre la démarche de trois petits bonshommes se déplaçant sur la terre. Ceux-ci ont rejoint la passerelle qui s’est escamotée sous l’engin. Il explique avoir été renversé par une décharge lumineuse au moment où le troisième sujet qui lui a fait face a actionné ses antennes, les deux autres étant de profil. S[-] s’est alors enfui en retroussant son pantalon. Le dialogue avec l’observateur s’avère fastidieux, notamment lorsque nous lui demandons de situer l’endroit de l’apparition. Nous remarquons alors qu’il ouvre plusieurs fois ses mains, sans en comprendre la signification. Un membre de sa famille nous apporte alors un dictionnaire franco-anglais, sur la page de garde vierge, S[-] a tracé au crayon l’objet qu’il a observé mais aussi une sorte de plan des lieux, lequel trop imprécis s’avère inexploitable par nos soins. Le dessin esquissé sur le Larousse, le 14 février 1975, peu après l’observation, est semblable à celui exécuté le 16 février 1975. L’objet volant non identifié a la forme d’un chapeau, type coiffure de la police montée canadienne. Deux hublots rectangulaires apparaissent à la partie supérieure; sous la soucoupe se trouve inclinée une courte échelle comportant trois marches.

Le 17 février 1975 à 8 heures, toujours très agité, encore dépourvu de la parole et de la vue, S[-] Antoine voudrait nous amener sur les lieux de l’observation mais, accompagné d’hommes armés. L’intéressé veut prouver sa bonne foi, mais ce transport est différé en raison du handicap physique du témoin. Avant tout, ce jeune homme doit être remis en confiance. Au début, son histoire a provoqué une certaine hilarité dans son village, puis il a fallu se rendre à l’évidence que les dires de S[-] Antoine pouvaient être pris au sérieux. Les renseignements complémentaires recueillis à son sujet indiquent qu’il est parfaitement équilibré. Plusieurs personnes entendues verbalement, semblent être convaincues de l’existence des soucoupes volantes, ou ne rejettent pas catégoriquement la possibilité de telles apparitions. Le même jour à 9 heures, nous contactons le responsable de la station météorologique de Gillot. il est porté à notre connaissance que dans le département de la Réunion, il n’est pas procédé au lâcher de ballons sondes. En outre, le président de l’aéro-club du Sud nous indique qu’aucun avion n’a décollé de la piste de Pierrefond Saint-Pierre le 14 février 1975 durant la journée.

A 11 h 45, nous rendons compte de la progression de l’enquête à notre chef de corps à Saint-Denis et l’informons de ce que le commandant L[-], directeur de la protection civile, doit se déplacer à Petite-Ile. L’officier supérieur de la gendarmerie nous signale qu’il se rendra à Petite-Ile le 18 février 1975, à 9 h 30.

A 18 heures, le 17 février 1975, téléphoniquement, le docteur H[-], remplaçant de son confrère T[-] nous dit avoir examiné S[-] Antoine dans la journée et que son diagnostic n’est pas alarmant. Le patient est difficile à questionner et peut rester dans l’état d’anxiété actuel, dû à un fort choc émotionnel, de trois jours à trois mois. L’état général est bon, le plus grand repos lui est conseillé sinon l’intéressé devra être confié à un psychiatre. Les autorités annoncées arrivent à Petite-Ile le 18 février 1975 à 9 h 30 et sont conduites auprès de S[-] Antoine. L’intéressé alité, a la tête enfouie dans des coussins et serviettes de toilette. Au bout de quelques minutes et malgré une mise en condition précaire, S[-] Antoine se soumet sans difficulté à l’interrogatoire du lieutenant-colonel commandant le groupement de la gendarmerie. Les gestes précisant l’OVNI et ceux de l’équipage sont les mêmes que ceux enregistrés les jours précédents. Parallèlement le commandant L[-], muni d’un appareil geiger procède à une détection de radioactivité sur la personne et les vêtements de l’observateur. Le résultat est négatif. S[-] Antoine, plein de bonne volonté, veut conduire les personnes intéressées sur le plateau du Piton-Calvaire, mais doit y renoncer en raison de sa cécité. C’est alors qu’il nous fait comprendre qu’une voisine, Mme F[-] Albert, présente lors du récit initial, serait en mesure de nous emmener dans le champ de maïs où il a aperçu l’OVNI. Cette personne nous rejoint rapidement et nous dit avoir remarqué trois trous dans le sol. Elle nous guide à l’endroit indiqué, qui se situe non loin de son domicile près du chemin cratère, soit dans le périmètre englobant le plan dressé par le témoin quelques heures après l’observation.

En l’absence du témoin principal, nous nous fions aux dires de Mme F[-]. Cette personne se dirige dans un champ d’une superficie de 13 ares environ, propriété de Mme O[-]. Le sol est dénudé, mais quelques souches de maïs subsistent. Dans l’angle nord-ouest, Mme F[-], accompagnée de ses deux filles retrouve finalement l’emplacement des trois trous qu’elle dit avoir remarqués au début de la matinée du 15 février 1975. Ils sont espacés d’un mètre et disposés en triangle isocèle. Ils n’ont pas de forme bien précise en raison de la friabilité de la terre et se confondent avec d’autres cavités ayant la même grosseur semblables à de petits bols profonds de 2 à 3 centimètres, très évasés. Ces creux répartis sur une grande surface du terrain semblent avoir été occasionnés par des oiseaux cherchant de la nourriture. La recherche d’autres indices s’avère d’autant plus compliquée que le sol a été largement foulé par des pas humains, plus particulièrement durant les journées des 15 et 16 février 1975. Le contrôle de la radioactivité effectué à cet endroit par le commandant L[-] est négatif.

Le 19 février 1975 à 22 h 45, au bureau de notre brigade, sommes avisés par M. S[-] Maximin que son fils Antoine a retrouvé, dans la soirée, l’usage de la parole et a retrouvé la vue. L’observateur désire que sa déposition soit rapidement enregistrée car il craint de ne pouvoir rester lucide très longtemps. A cet effet, l’audition de l’intéressé est recueillie à 23 h 50. Pendant près d’une heure, le gendarme enquêteur doit écouter le déroulement des faits vécus par S[-] Antoine le 14 février 1975 vers 13 heures. Il ne se souvient pas être resté six jours dans un état comateux et réalise péniblement cette vérité apportée par les siens. Au cours du récit qui reflète parfaitement les explications fournies par gestes, S[-] Antoine a des coupures. C’est-à-dire que pendant quelques secondes il retombe dans un état second. Lorsqu’il reprend ses esprits son corps tressaille. Il dit alors avoir été en communication avec l’objet, il veut nous conduire sur les lieux de l’observation. En raison de la nuit complète et de l’état de fatigue de l’intéressé, ce transport est reporté au début de la matinée du 20 février 1975. Nous mentionnons qu’au début de notre entretien, S[-] Antoine porte à notre connaissance que deux jours avant l’apparition, il avait déjà entendu, dans un rêve, les sons « bip-bip » et que cela l’avait intrigué et énervé. Cet élément précurseur des faits est vraisemblable car un habitant de la commune de Petite-Ile avait remarqué les 12 et 13 février 1975, l’attitude peu communicative de l’intéressé qui travaillait dans le magasin de son employeur, M. Gabriel A[-] L’observateur précise que l’échelle à trois marches en forme de porte ne touchait pas complètement le sol, que le premier personnage, genre nain Michelin, portait un instrument brillant et le second une sorte de sachet ou cornet également étincelant. Il ne les a pas vus en action de prélèvement d’échantillons de terre. Il a remarqué qu’ils se déplaçaient plus facilement sur l’échelle au contact du métal que sur le sol où leur démarche était gauche.

A 8 h 30, le 20 février 1975, S[-] Antoine, fermement décidé à nous montrer le lieu de l’apparition de l’OVNI, prend place dans la jeep de la brigade de Petite-Ile conduite par le gendarme C[-] M. S[-] Maximin est présent, il accompagne son fils sur le chemin de terre aboutissant au sentier qui conduit aux habitations des S[-] et tape sur l’épaule du chauffeur, lui indiquant ainsi le champ de maïs déjà prospecté par les enquêteurs le 18 février 1975. S[-] Antoine fait quelques pas dans le champ, son regard dirigé vers le fond de la parcelle près du bois de filaos, il s’arrête subitement, porte les mains à ses oreilles en appuyant très fort, puis il vacille s’écroulant sur le sol. Son pouls retentit faiblement, ses mains sont froides, ses yeux se révulsent. il est immédiatement ramené chez lui et ne reprend partiellement ses esprits que trente minutes plus tard. Il explique alors qu’une force inexplicable l’empêche d’avancer en direction du lieu précis où il a observé l’objet volant non identifié. Sur prescription du docteur L[-], S[-] Antoine doit être examiné par un psychiatre à l’hôpital Saint-Paul. L’intéressé accepte ce contrôle mais veut être accompagné par sa mère. A 8 h 55, le lieutenant-colonel commandant le groupement de gendarmerie de la Réunion est mis au courant des évolutions de l’enquête et plus particulièrement du comportement physiologique de l’observateur. Le même jour nous apprenons que S[-] Antoine, examiné à l’hôpital psychiatrique de Saint-Paul, a regagné son domicile dans le courant de la matinée.

Un deuxième contrôle de la radioactivité est effectué le 20 février 1975 sur la personne de S[-] Antoine, soit six jours après l’apparition supposée de l’engin non identifié. Le commandant L[-] n’a pas décelé de présence de radioactivité.

Au cours de l’enquête, plusieurs personnes ont été entendues notamment l’employeur, la fiancée, les compagnons de l’observateur ainsi que le maire de la commune de Petite-Ile. Unanimement, elles dépeignent S[-] Antoine comme un garçon sérieux, honnête, sobre et jouissant de l’estime générale. L’audition de Mme S[-] Marie confirme sa déposition verbale du 15 février 1975 ayant motivé l’ouverture d’une enquête. Celle de Mme F[-] Marie précise que l’intéressée a été témoin d’un deuxième malaise survenu à S[-] Antoine le 22 février 1975 alors qu’il s’approchait du lieu où il avait observé la soucoupe volante. Malaise analogue à celui du 20 février mais d’une durée de deux heures. Dans divers témoignages, tant verbaux qu’écrits, il est précisé que S[-] Antoine n’est pas passionné de télévision (il n’en possède pas), ni de lectures à caractère scientifique ou humoristique traitant des soucoupes volantes ou autres phénomènes extra-terrestres.

Enfin le 24 février 1975 à 16 h 30, au cours d’une interview officielle accordée à un journaliste de Saint-Denis de la Réunion, S[-] Antoine accepte de se rendre sur le terrain du Piton-Calvaire. Aucune objection n’est formulée par les membres de sa famille. Arrivés à destination, c’est-à-dire dans le champ décrit plus haut, l’observateur, dès qu’il foule le sol, est victime d’une syncope inexplicable. Comme les deux fois précédentes il est possédé, semble-t-il, par la vision initiale, qui l’a profondément choqué. L’observateur agite ses mains parallèlement au sol, ses yeux se révulsent, son pouls ralentit et les extrémités des membres refroidissent. Ramené à sa demeure, il reprend ses esprits trente minutes plus tard.

Entendu à nouveau le 25 février 1975, S[-] Antoine ne peut expliquer ses pertes de connaissance chaque fois qu’il se rend sur place. Il entend encore les sons « bip bip », l’obligeant à se boucher les oreilles. Il affirme n’avoir jamais entendu parler d’une soucoupe volante aperçue en 1968 dans la plaine des Cafres (île de la Réunion) et déclare ne pas lire ou feuilleter des revues de science fiction.

De l’enquête effectuée, il ressort que S[-] Antoine, de bonne conduite et moralité, normalement équilibré, n’est pas un simulateur. Les personnes entendues ne croient pas à une hallucination de l’observateur et ses dires sont pris au sérieux. D’ailleurs deux personnes dignes de foi ont été témoins de l’observation d’un objet volant non identifié dans le ciel réunionnais. Il s’agit de M. P[-] Guy, déjà entendu, qui a aperçu un objet lumineux le 10 février 1975 vers 22 heures, se déplaçant à vive allure, et de Mu. V[-] Jocelyne, seize ans, domiciliée à Saint-Benoît (Réunion) qui a vu, le 16 février 1975 à 20 heures, une boule lumineuse avançant lentement.

A ce jour, 6 mars 1975, date de clôture du présent procès-verbal, S[-] Antoine a repris, semble-t-il, toutes ses facultés physiques et morales. Toutefois, en raison de trois défaillances ayant affecté l’observateur à l’approche du lieu de l’observation de l’objet volant non identifié, nous n’avons pas cru devoir effectuer une quatrième tentative, ce qui pourrait encore être néfaste pour l’intéressé.

Fait et clos à Petite-Ile, le 6 mars 1975.

Voici le certificat médical par le docteur T[-] de la faculté de médecine de Lyon, 97420 Petite-Ile, Réunion:

Le 6 mars 1975, je soussigné certifie avoir examiné le 14 février 1975 M. S[-] Antoine, domicilié à Petite-Ile, Réunion, qui m’a déclaré avoir été victime d’un phénomène « bizarre ». Ai constaté ce qui suit:

Etat de fatigue extrême avec prostration, angoisse, perte partielle du langage, fixité du regard. Il semble s’agir d’une crise d’aspect pithiatique survenue au cours d’un choc émotionnel intense, difficile à préciser, mais réel, car il s’agit d’un sujet qui, antérieurement, n’a manifesté aucun trouble tant neurologique que psychiatrique.

Certificat remis à la gendarmerie sur sa demande.

Voici le procès-verbal d’audition par la Gendarmerie Nationale, compagnie de Saint-Pierre, unité brigade de Petite-Ile.

Ce jour, 23 février 1975, nous entendons S[-] Antoine, né le 28 août 1953 à Petite-Ile, chauffeur-commis, qui nous déclare, à 23 h 50:

Dans la nuit du 11 au 12 février 1975, j’ai rêvé à des raisins. La même nuit, j’ai rêvé sans rien voir mais j’ai entendu des sons, genre bip-bip, qui me parvenaient tantôt près, tantôt très loin. Cela a duré toute la nuit. Le matin, alors que je me brossais les dents, j’entendais toujours les mêmes sons, mais très lointains. Avant de partir au travail, j’ai parlé du rêve de raisin à mon amie Mauricette L[-] Au cours de la matinée, j’en ai également parlé à deux camarades de travail Marc L[-] et Guy P[-] Ces personnes m’ont dit n’avoir jamais rêvé de ces fruits. Je voulais également leur parler de l’autre rêve, mais je ne pouvais pas le faire. J’ignore pourquoi. J’étais énervé, je pouvais travailler, mais j’étais gêné car j’entendais toujours les mêmes sons. Je pensais aller consulter un médecin, mais quelque chose m’en empêchait. Cela a duré jusqu’au vendredi 14 février 1975. Ce jour-là, à 12 h 05, j’ai dit à ma patronne qu’il fallait que je parte. Elle a été étonnée car c’était l’heure de fermeture du magasin, mais cela aurait pu arriver à n’importe quelle heure de la matinée. Les bip-bip me cassaient les oreilles. Avant de quitter la boutique j’ai pris un paquet de grattons, ensuite je suis parti en courant en passant par le stade, puis près du cimetière, mon itinéraire habituel. Les sons s’accentuaient de plus en plus, parfois je ralentissais mon allure, puis je reprenais la course. J’étais seul. Puis à un moment donné j’ai été obligé de m’arrêter comme retenu par une force surnaturelle. Je me trouvais alors près du sentier menant à ma case et à celle de mes parents, mais encore sur le chemin carrossable. J’avais l’impression que mes tympans allaient éclater. J’ai alors pivoté lentement pour sortir du chemin et avancer quelques mètres dans un champ de maïs. J’ai alors ressenti une chaleur étrange, accompagnée d’un souffle brûlant, j’étais figé, comme paralysé, je ne pouvais faire un geste, c’est alors que j’ai aperçu un engin ayant la forme d’un grand chapeau ou d’une tasse posée sur une soucoupe renversée. Cet objet brillait intensément. Il avait la couleur aluminium et se trouvait à environ à 1,50 mètre du sol. Il était donc stabilisé et émettait toujours les mêmes sons. Ensuite, une échelle à trois marches est apparue de dessous la soucoupe. Elle s’est inclinée à environ 45 degrés mais ne touchait pas la terre. Il est alors sorti de l’engin un petit bonhomme bizarre de forme boudinée, comme Michelin, également brillant comme la soucoupe. Il portait à la main droite un objet long de 30 centimètres environ toujours brillant. Sur l’escalier il avait l’air d’être à l’aise, mais dès qu’il s’est trouvé à terre, sa démarche est devenue différente, gauche, le sujet se déplaçait à pieds joints. Un deuxième, puis un troisième petit bonhomme ont rejoint le premier. Celui-ci grattait le sol, je ne l’ai pas vu mettre de la terre dans le sachet également brillant que tenait le second. Tous les trois avaient des antennes sur la tête de chaque côté. Je les voyais de profil. A un moment donné, j’ai vu le troisième bonhomme qui pivotait pour me faire face. Ses antennes ont bougé. A ce même instant, j’ai vraiment réalisé ce que je voyais. Tout de suite mon regard s’est porté vers le haut de la soucoupe, dans la tourelle. A travers le hublot circulaire, j’ai aperçu la tête d’un quatrième robot, portant une sorte de casque, genre scaphandre. Je pense que le troisième bonhomme m’apercevant a dû donner l’alerte. J’ai alors été projeté en arrière par un puissant éclair. J’ai pu voir les petits bonshommes remonter plus vite que pour descendre. L’échelle s’est escamotée faisant un bruit hydraulique. Aussitôt l’engin s’est élevé provoquant un très fort sifflement. Je n’ai pu voir la direction qu’il prenait. J’ignore combien de temps je suis resté à terre. J’ai alors retroussé le pantalon et je suis parti directement chez mes parents en apportant le paquet de grattons. Je ne me souviens pas avoir perdu l’usage de la voix ni être devenu aveugle. Ce soir, j’ai préféré vous faire mon récit qui est réel, car je crains de devenir aveugle et muet. Je pense que demain, au jour, je pourrai vous emmener sur les lieux où j’ai été témoin de l’apparition de l’objet en question.

Le 23 février 1975 à 1 heure, lecture faite par moi, persiste et signe.

Le 25 février 1975, nous avons entendu à nouveau s[-] Antoine, observateur, qui nous déclare à 10 heures:

Je n’ai pratiquement rien à ajouter ou à changer à ma précédente déclaration. L’objet que j’ai vu avait la forme d’un chapeau de dame ou d’un oeuf coupé en deux posé sur une soucoupe. Il avait la dimension d’une voiture ordinaire, tout brillait, l’engin, les sujets qui en sont descendus, et les outils qu’ils portaient. Je regrette beaucoup de ne pouvoir vous indiquer l’endroit précis. Effectivement je suis toujours décidé à me rendre sur place, mais chaque fois que j’arrive dans le champ je perds connaissance. Immédiatement, j’entends des bruits et sons lointains « bip-bip ». Je suis obligé de me boucher les oreilles et je vous assure que je ne fais pas ça intentionnellement. Chaque fois, je suis surpris de me retrouver allongé sur un lit et je ne me souviens jamais avoir eu un évanouissement. Je suis encore faible, je pense un jour retrouver toute ma lucidité et ma force physique qui me permettront de conserver mon équilibre moral. Je pourrais alors situer l’endroit exact où j’ai vu l’OVNI. De mon existence, je n’ai jamais ouvert une revue, ou livre de science fiction où figurent des objets tels que soucoupes ou fusées. Je n’avais jamais entendu parler de la soucoupe volante de la plaine des Cafres.

Demain ou après-demain, je dois me rendre à Saint-Pierre consulter un docteur qui doit venir à l’hôpital psychiatrique de Saint-Paul. En tout état de cause, je ne me considère pas comme un malade mental. J’ai été choqué et bouleversé et cela m’a affaibli. Parfois ma tête chavire et je dors debout. Je m’aperçois alors que quelqu’un me passe un mouchoir sur le visage, puis tout redevient normal.

Le 25 février 1975 à 10 h 20, lecture faite par moi de la déclaration ci-dessus, j’y persiste et n’ai rien à y changer, à y ajouter ou à y retrancher.

Voici le procès-verbal de l’interrogation de l’employeur témoin le 21 février 1975 par la même brigade de la Gendarmerie Nationale:

Le 21 février 1975, nous entendons M. A[-] Gabriel, âgé de quarante-cinq ans, commerçant, employeur du témoin, qui déclare:

Depuis six mois environ, j’emploie le nommé S[-] Antoine comme garçon de magasin. Parfois il fait également les livraisons avec ma camionnette. Ce garçon est très sérieux, ne boit pas, ne fume pas, ne cherche pas d’histoires à quiconque. J’affirme qu’il me donne entière satisfaction dans son travail, mais je le trouve un peu personnel. Il ne cherche pas à engager la conversation et il est peut-être un peu vif. Mais à aucun moment je ne l’ai vu se mettre en colère chez moi. Le 15 février 1975 par l’intermédiaire de sa soeur, j’ai appris que S[-] a vu) le 14 février 1975, vers 13 heures, alors qu’il regagnait son domicile, un engin non identifié qui pourrait être une soucoupe volante. Connaissant ce jeune homme, je ne pense pas qu’il invente une histoire pour se rendre intéressant. Il m’est difficile de me prononcer mais je pense que les affirmations de S[-] peuvent être prises au sérieux. Je ne l’ai jamais vu lire des livres ou revues scientifiques. Il ne m’a jamais parlé d’une affaire semblable. En ce qui concerne l’affaiTe d’une soucoupe volante à la plaine des Cafres, je crois que S[-] n’était même pas au courant.

Le 21 février 1975 à 18 heures, lecture faite, persiste et signe.

Voici le procès-verbal de l’interrogation de la petite amie du témoin le 21 février 1975 par la même brigade de la Gendarmerie Nationale:

Le 21 février 1975, nous entendons L[-] Marie, nationalité française, qui nous déclare:

Depuis le 28 octobre 1974, je vis en concubinage avec S[-] Antoine; nous allons bientôt nous marier, c’est un garçon sérieux, il ne boit pas, ne fume pas et ne cherche pas d’ennuis à quiconque. Le 14 février 1975, je me trouvais à la maison. Avant de venir déjeuner, mon fiancé s’est rendu chez ses parents. J’ai trouvé anormal qu’à 13 heures il ne soit pas encore rentré. Je me suis rendue moi-même chez mes beaux-parents et j’ai appris qu’Antoine était allongé sur un lit. Il était pâle, et j’ai remarqué qu’il transpirait et ne disait absolument rien. J’ai pensé qu’il avait de la fièvre et je l’ai laissé dormir. Vers 15 heures, je me suis aperçue qu’il pleurait. Je lui ai demandé la raison de cette tristesse. Il a expliqué qu’il avait aperçu un objet en forme de grand chapeau avec trois petits personnages à côté de l’engin, ainsi qu’un autre resté à bord. Il m’a expliqué qu’un petit bonhomme avait un genre de sachet brillant dans ses mains, un autre portait un outil qu’il piquait dans le sol, le troisième se trouvait toujours sur un petit escalier composé de trois marches. Précisément, ce troisième personnage a fait fonctionner les antennes qu’il portait sur sa tête, les autres aussi avaient des antennes. A ce moment-là le personnage qui était resté dans la cabine de l’appareil s’est présenté à un hublot et avait aussi des antennes sur la tête. Mon fiancé attiré par cet objet, s’est avancé discrètement dans cette direction. Il a alors reçu un éclair provenant de l’appareil, l’aveuglant complètement. Mon fiancé a été projeté à terre en apercevant les trois petits personnages qui montaient dans l’appareil qui a décollé en sifflant. Mon fiancé ne lit absolument pas de livres ou revues scientifiques, il ne se drogue pas. Je pense que les explications qu’il a faites peuvent être prises au sérieux, ce n’est pas un garçon à faire parler de lui. D’ailleurs, il avait perdu l’usage de la parole du 14 février 1975 vers 19 heures au 19 février 1975 vers 21 heures environ. Je n’ai jamais entendu parler de l’affaire qui s’est déroulée dans la commune de la plaine des Cafres. Antoine ne m’a jamais parlé de cette apparition, je crois qu’il ne le savait même pas. Antoine porte en permanence un chapeau, je ne pense pas qu’il ait été victime d’une insolation. Il n’a jamais été malade, mais parfois il a de la sinusite. En toute sincérité, je crois qu’Antoine a été choqué par cette affaire, je pense moi-même qu’il a réellement aperçu un objet. Je tiens à préciser que le 12 février 1975, Antoine avait fait un rêve, il voyait du raisin et il a appris que cela signifie malheur. Le 13 février 1975, il m’en a parlé et m’a demandé si je n’avais pas fait un rêve semblable.

Le 21 février 1975 à 17 heures, lecture faite par moi, persiste et signe.

Voici le procès-verbal de l’interrogation de la mère du témoin le 22 février 1975 par la même brigade de la Gendarmerie Nationale:

Le 22 février 1975 au bureau de notre brigade, nous entendons H[-] Marie, épouse S[-] qui nous déclare, à 15 h 30:

Le 14 février 1975 en entrant à mon domicile vers 16 h 30 j’ai trouvé mon fils Antoine, âgé de vingt et un ans assis sur un banc dans la cuisine. Il avait les deux coudes sur les genoux, les mains sur le crâne et il pleurait. Je lui ai demandé s’il avait mal à la tête. Il m’a répondu par l’affirmative. Je lui ai demandé s’il avait reçu des coups, s’il avait eu un accident ou s’il était tombé. Sa réponse a été négative. Il a ajouté que s’il racontait ce qu’il avait vu, personne ne le croirait. A ce moment-là, j’ai remarqué qu’il avait peur, il criait et pleurait. J’ai réussi à le faire parler. Il m’a alors fait le récit qu’il a fait plusieurs fois par la suite. Rentrant du travail, se trouvant pas très loin de chez lui sur un chemin de terre, il avait vu une grosse boule très brillante. Il m’a expliqué que trois bonshommes petits et gros étaient descendus de la boule par un escalier composé de trois marches. Le premier qui a touché le sol portait un objet brillant à la main, le second tenait un genre de cornet, également brillant, le troisième ne semblait rien porter. Il voyait ces bonshommes de profil. Tous les trois étaient vêtus de vêtements brillants, ayant l’aspect du bonhomme Michelin.

Ils avaient des antennes sur la tête. Lorsque le troisième a pivoté dans la direction de mon fils, les antennes ont bougé. C’est alors qu’un éclair très puissant est parti de la partie supérieure de la boule, le projetant en arrière. Antoine ne sait pas combien de temps il est resté allongé sur le dos. Il s’est relevé, a retroussé ses pantalons et est parti en courant directement chez nous. Antoine a mis très longtemps pour nous expliquer ce qui était apparu à ses yeux. Il faisait beaucoup de gestes, comme s’il dessinait ce qu’il avait vu. Il tremblait, son regard est devenu fixe et petit à petit sa voix s’est éteinte. Des voisins sont arrivés et l’ont porté dans ma chambre. Nous lui avons donné de la tisane de romarin. Un peu plus tard nous avons fait venir le médecin de Petite-Ile. Le docteur nous a dit que mon enfant avait reçu un mauvais choc, ajoutant qu’il reprendrait bientôt l’usage de la parole. Antoine entendait bien, il a même, à ma demande, dessiné l’engin sur une feuille de dictionnaire. Il comprenait tout ce que nous lui de mandions mais ne pouvait parler. Il sursautait souvent, au moindre bruit. J’étais très inquiète. Un autre médecin remplaçant le docteur T[-] nous a dit qu’il ne fallait pas se décourager. Il a cependant constaté que mon fils avait été fortement choqué. Le mercredi 19 février 1975, vers 20 heures, Antoine a poussé un cri en levant les mains, puis il a prononcé le mot « maman. » Il s’est alors passé la main sur les yeux et nous a dit qu’il y voyait. Nous étions tous soulagés. Il nous a dit qu’il était très fatigué et qu’il sortait d’un long rêve, qu’il ne pouvait expliquer. Nous lui avons dit que ce rêve était connu des gendarmes et que ceux-ci voulaient le réentendre de sa bouche. Un peu plus tard, Antoine a voulu que les enquêteurs viennent à la maison, car il craignait à nouveau de ne plus pouvoir s’expliquer. Il vous a alors raconté son accident en détails, comme il nous l’avait fait le 14 et les jours suivants, par gestes. Actuellement, mon fils est encore faible. Il a été examiné par un docteur psychiatre à Saint-Paul, qui doit le revoir mercredi ou jeudi prochain à Saint-Pierre. Il n’a pas été considéré comme malade mental. Depuis le premier jour, je n’ai jamais considéré mon enfant comme fou. Antoine est un garçon sain de corps et d’esprit. Il n’a jamais été soigné de la tête. Il est normalement équilibré, il ne s’adonne pas à la boisson, ne fume pas. Il ne fréquente pas les salles de cinéma, ne lit pas beaucoup. Il n’était pas au courant de la soucoupe volante aperçue à la plaine des Cafres il y a quelques années. Mon fils ne ment pas. J’ai tout de suite cru ce qu’il disait. Nous avons parlé de cette apparition en famille et nous sommes à présent convaincus que mon fils a vraiment vu l’engin qu’il décrit toujours de la même façon. Il n’a pas été victime d’une hallucination. Antoine est bien considéré par son employeur, ses camarades de travail, ainsi que dans le voisinage. A deux reprises, Antoine, depuis qu’il a retrouvé la vue s’est rendu sur les lieux afin de montrer l’endroit exact où il a vu l’engin. Chaque fois, en arrivant à proximité, il s’est évanoui. Nous allons le surveiller et lorsqu’il sera complètement rétabli, nous vous en aviserons. Aucun membre de ma famille n’a été soigné pour maladie mentale. Je me tiens à votre entière disposition pour vous fournir d’éventuels renseignements utiles à votre enquête.

Le 22 février 1975

 

FSR-1979-V-25-N-2

FSR-1979-V-25-N-3

Michelin-Men-1975Reunion-Island